Libertarian Kids

samedi 16 avril 2005

radio.blog

Comme vous avez peut-être déjà remarqué, depuis cette après-midi, une radio.blog, fort mal placée d'ailleurs, et donc en attente de modification de code, s'est ajoutée à Libertarian Kids.

Un petit commentaire sur les titres disponibles. Tout d'abord, The end has no end, des Strokes, sur laquelle j'ai littéralement tilté, la première fois que l'ai entendue dans une publicité pour EDF. Ensuite, une de New Found Glory, et Descendents, extraits d'un de mes anciens achats : Rock Against Bush, dans une autre vie étatiste, mais que j'aime toujours à écouter :-D.

Une chanson très très commerciale de Linkin Park : Somewhere I belong (shame on me). Et enfin quelques chansons de certains groupes anglophones : Blink-182 ou encore Green Day, ou francophone : Luke. Vous les avez peut-être déjà entendu à la radio, ou autre part. Et pour finir, il y a deux private jokes, à savoir les deux chansons du groupe Kinito, dont les paroles sont dignes d'être élevées au firmament de la nullité consacrée. A écouter une fois, peut-être, mais ne pas oublier qu'il s'agit d'auto-dérision ;).

Pourquoi je suis minarchiste

Après une discussion assez longue sur le forum de la communauté libérale, avec notamment Eskoh et Lafronde, qui n’est peu être pas encore close, je vais tenter d’expliquer le pourquoi, et le comment de « mon » minarchisme.

Cela n’est pas tache aisée, je le concède. Et je l’affirme d’emblée : la vision anarcho-capitaliste est clairement beaucoup plus cohérente, si l’on se place du point de vue du Droit Naturel, puisqu’elle préconise l’abolition de l’Etat, comme structure, par essence, criminelle et violatrice des droits individuels. Je ne m’étendrais pas sur cette proposition, qui me semble difficilement contestable, mais je souhaite néanmoins aborder un point avant de rentrer pleinement dans le sujet : j’ai une difficulté mentale assez conséquente, pour ne pas dire une impossibilité psychologique à imaginer une société sans Etat. Je vais donc essayer d’organiser ce post en deux temps : une conception de la minarchie, et dans un second temps, une tentative de réponse aux objections potentielles des anarcho-capitalistes.

Tout d’abord, je me dois de préciser un point : la compréhension de ce qu’est l’Etat, ne me paraît pouvoir se faire que par l’étude du droit positif, et dans les relations qui le lie au Droit naturel. Calquer uniquement un schéma jusnaturaliste ne peut aider à donner du sens, et pour saisir ce qu’est l’Etat. Puisque j’estime que les liens de l’Etat à la liberté et à la propriété sont tout à fait ambiguës : à la fois, l’Etat garantit et institue via le droit positif, les droits de propriété, et les diverses libertés civiles ; mais, en même temps, il les viole allégrement, ne serait-ce que par la monopolisation de services, la réglementation… Le schéma global me semble quelque peu plus nuancé, et plus subtile qu’une sentence expéditive.

L’on pense, au premier abord, quand on évoque l’anarchie, à une sorte d’état de nature hobbésien. Et je me propose d’essayer de définir pourquoi je pense que l’absence de monopole de la coercition dans les activités de police et de justice, mène à la "guerre de tous contre tous". Tout d’abord, la police et la justice, basées sur l’exercice de la coercition et du Droit, ne sont pas de la même nature que les autres produits et services échangés sur le marché. Précisément, quelles sont les conditions de l’échange volontaire ? La définition des droits de propriété et la sécurité. On voit bien ici que le Droit et l’exercice de la coercition pour le faire respecter, sont donc les conditions d’un fonctionnement du marché. Le marché et l’échange volontaire ne peuvent exister qu’après la définition des droits. En ce sens, je pense qu’il s’agit là l’un point tout à fait crucial à intégrer, pour voir la spécificité de l’Etat.

Je vais essayer de faire un petit parallèle : je viens tout simplement de dire que la loi positive, qui tend vers les conceptions jusnaturalistes est une condition de la liberté. Je pourrais simplement évoquer ce que le langage courant a appelé « loi scientifique » ou « loi économique ». Il s’agit là de normes, que personne ne peut transgresser, car il est dans leur nature d’être immuables, et elles ne peuvent se plier à la volonté humaine. Encore une fois, elles sont un cadre, à l’intérieur duquel il n’y a pas de loi prescrite, où les personnes sont libres au sens métaphysique du terme, et non contraintes par des causes qui leur échappent.

Maintenant, que l’on a abordé la spécificité de l’activité de coercition, je me propose d’expliquer pourquoi il me semble nécessaire qu’elle soit monopolistique. Je trouve assez malaisé, d’imaginer une confrontation territoriale entre différentes entreprises de coercition, pour la simple raison que cela impliquerait que le cadre légal des échanges différerait d’une façon discontinue dans l’espace. Le fait qu’il n’y ait plus de continuité territoriale pour la souveraineté des Etats me semble être une source d’instabilité pour une minarchie. Je vais prendre un seul exemple : celui de la défense nationale. En minarchie, l’Etat monopolise la défense, qu’il finance via les impôts (modérés) de ses ressortissants. Une telle activité est par essence non-excluable, parce que précisément, dans une guerre, on protége un territoire où il y a des populations, mais cela reste fondamentalement un affrontement spatial. Ainsi, apparaît notre free-rider, qui peut donc bénéficier de la défense nationale, sans payer pour cela, et tout en faisant sécession. Je doute qu’à ce rythme, il existe encore une défense viable pour la minarchie. Mais, ces caractéristiques s’appliquent également à une entreprise privée de défense : elle sera aussi confrontée à ce problème, du fait simple, que l’ensemble des Etats sur la surface du globe ne seront pas minarchistes, et que, par voie de conséquence, elle ne pourra adopter, entre autres, qu’une défense territorialisée.

Il apparaît, par conséquent, que la définition des droits est la condition de la liberté, et qu’il est dans la nature, des activités de défense d’être monopolistiques, du moins tant qu’il y a des Etats sur la surface de ce globe, qui enserrerait une hypothétique minarchie. Le Droit, et la police et la justice, ses corollaires pratiques, sont un cadre de base immuable qui permet l’échange volontaire. Non, qu’il ne faille laisser aux juges certaines interprétations du Droit, mais la définition des droits de propriété reste la base de toute société d’échange. Et le commencement des coopérations et des arbitrages privés.

Pourquoi ce cadre est-il nécessaire ? Parce que le Droit doit être respecté, ou plutôt ne pas être enfreint. La notion de Droit inclut donc, en elle-même, le savoir que les hommes possèdent, dans leur nature, des failles dans leur collaboration volontaire,… puisqu’il est nécessaire de respecter et de faire respecter ce Droit. La théorie libérale cherche à restreindre au maximum le champ de l’exercice de la violence et de la contrainte dans les rapports sociaux. Mais, c'est, précisément, là où je pense que les anarcaps se trompent en partie : l’abolition de l’Etat ne fera pas disparaître les tendances hégémoniques de l’individu. Elle ne fera que les déplacer, dans les entreprises de sécurité. Nul besoin de préciser, par ailleurs, que la coercition est une activité dont les conséquences néfastes sont démultipliées… Même si la question des libéraux aux étatistes, reste : « pourquoi souhaitez-vous sciemment que la violence régisse vos vies ? », ils ne peuvent, néanmoins, pas oublier de se rendre compte que l’utilisation de la violence, et surtout la tentation de cette utilisation, ne sont pas irréductibles et ne peuvent pas être abolies à jamais ! La confusion est tout simplement celle de considérer l’Etat comme la seule entité à violenter : il faut garder à l'esprit que l’Etat reste le produit des désirs des individus, et, à partir de ce point, rien ne les empêche de transposer leur volonté de puissance sur d’autres plans, plus ou moins néfastes.

Alors, je suppose qu’on peut me faire une objection majeure : au regard de l’Histoire, quelle inconséquence de vouloir confier le monopole de la force, à l’entité qui a violé le plus les droits naturels des individus ? C’est d’abord oublier, comme je l’ai précisé plus haut que le topo sur la question est un peu plus compliqué, que malgré tout, les Etats ont institué la plupart du temps les droits de propriété, même s’ils étaient limités. Je retourne la question donc, aux anarcaps : en quoi une société où la concurrence est libre pour les activités de coercition préserve-t-elle mieux les droits naturels que lorsque cette activité est monopolisée ? D’après ce que j’ai dit précédemment, rien n’est moins sur. On pourra me répondre que la grande différence avec un marché fermé, est que la concurrence permet de limiter le pouvoir de chacun, qu’elle atomise le marché.

Mais, c’est bien faire peu de cas des théories diverses des contre-pouvoirs de l’Etat. "Le pouvoir arrête le pouvoir", nous disait Montesquieu, formulant sa thèse de la séparation des pouvoirs. Hans Kelsen, le juriste autrichien, nous a légué, pour sa part, la théorie de l’Etat de droit. Est-ce parce qu’il fut un positiviste, que les libéraux doivent dénigrer son travail ? Je l’ai déjà plus ou moins dit, le droit positif doit tendre aux thèses du Droit Naturel, sans pour autant oublier qu’il est un aiguillon, et que son axiomatique n’est pas une preuve intangible d’efficience. David Friedman nous rappelle bien les limites de la conception propriétariste. La hiérarchisation des normes juridiques, les procédures légales, les limitations constitutionnelles, sont des garanties, à l’intérieur de l’Etat, pour qu’il ne recommence pas à violer les droits naturels – en dehors de la sphère de financement des activités de justice et de police. Et finalement, le contre-pouvoir final n’est rien de moins, que le droit pour les individus, de porter des armes, et de pouvoir se révolter contre lui. Locke, qui était minarchiste, en avait bien vu la nécessité.

J’aimerai ajouter encore deux points. Il y a fondamentalement deux domaines à l’intérieur de l’Etat : d’une part, les activités marchandes qu’il a monopolisé, et d’autre part, ses institutions, c’est-à-dire celles qui garantissent son fonctionnement légal. Je voudrais insister sur ce point : la stabilité de l’activité de l’Etat dans les domaines régaliens, tient à ce caractère institutionnel, à la grande différence d’un univers concurrentiel où rien n’est définitivement stable. Et je souhaite souligner un dernier point : un concept sous-tend actuellement la politique étrangère de George W.Bush, il s’agit de la notion d’« Etat voyou », qui désigne, outre les pays de l’Axe du Mal, ceux qui ne coopèrent pas avec les USA ou ont une position ambiguë à leur égard, et qui sont supposés agir de concert ; ce sont la Syrie, le Pakistan, etc. On voit donc cette opposition assez nette, entre les Etats, et je souhaite pour ma part, si je veux le choisir vivre sous le régime des Etats non-voyous. Alors, de deux choses : le jusnaturalisme ne peut rendre compte de cette situation, et d’autre part, on voit ici comment certains hommes sont malintentionnés, et qu’ils ne sont pas absents des agences de sécurité privée, dans un monde anarcho-capitaliste.

A choisir entre le « mal nécessaire », qu’est, à mes yeux, l’Etat minarchiste, et le retour à un état de nature rudimentaire, je préfère, sans hésiter, la première alternative. Et je donne mon sentiment : j’estime qu’il existe une grande différence entre les libéraux qui acceptent l’existence de l’Etat, et ceux qui la refusent ; à mes yeux, il n’y a pas continuité, il y a nettement rupture entre ces deux tendances (ou tout du moins, en ce qui concerne ma position minarchiste).